Par ce terme de « publications scientifiques fictives » nous désignons les publications à contenu faible ou dont les auteurs n'ont pas élaboré le contenu. Il ne s'agit pas d'erreurs, d'impasses ou de falsification de résultats, mais tout simplement de la production d'articles dans le seul but de publier des articles. Ce phénomène marginal s'est amplifié.

Les articles à contenu faible sont des comptes rendus à contenu insignifiant ou peu intéressant (sans nouveauté particulière). Les auteurs les publient parce qu'il faut publier. C'est souvent à contrecœur, car ils estiment que cela leur fait perdent leur temps. On entend parler régulièrement de cette contrainte dans le milieu académique. 

Un article dont l'auteur n'a pas élaboré le contenu est frauduleux. Le procédé consiste à « faire du copier/paraphraser/coller », dit Guillaume Cabanac, qui a mis au point un logiciel pour détecter ces pratiques. Paraphraser revient à remodeler le texte d’origine. Il existe des sites en ligne qui peuvent le faire très rapidement.

Dans les deux cas d'articles fictifs, les auteurs n'ont aucun savoir à transmettre, aucune découverte particulière à faire évaluer par leurs pairs. Ils signent des articles pour « avoir des publications », parce que le fonctionnement académique impose des quotas de publications.

Cabanac signale que « le problème est systémique, et pas individuel. En effet, les individus sont en prise avec des systèmes qui les régissent et qui imposent par le haut une performance difficile, voire impossible à atteindre. [...] Quand cela devient trop dur [...] on peut être tentés de se tourner vers ce que l’on appelle les papers mills (« moulins à articles »). Ce sont des entreprises qui proposent, moyennant finance, de produire des articles plus ou moins bidon sur lesquels vous pouvez mettre votre nom et les publier. »

Par ailleurs un rôle délétère est joué par l'obligation de citations.  Il faut citer et être cité. Il se crée ainsi des réseaux plus ou moins artificiels dans lesquels les auteurs se citent les uns les autres. Selon Cabanac. « Une des stratégies de ces entreprises est de vendre des articles bidon qu’ils fabriquent eux-mêmes, puis ils proposent à leurs clients de se citer les uns et les autres pour augmenter artificiellement l’impact de leurs publications. » 

Les articles frauduleux découverts sont dépubliés ou « rétractés ». Mais une fois la machine lancée, il est difficile de l'arrêter. D'après ses recherches Guillaume Cabanac  estime que « parmi les 130 millions d’articles scientifiques parus dans le monde, il y en a plus de 800 000 qui citent au moins un article rétracté ».

Ce phénomène est propre à notre époque. Il vient de la massification de la recherche et des contraintes académiques inadaptées qui nient la spécificité des découvertes scientifiques. Ces normes l'assimilent à la production d'objets et exigent une quantité. La découverte en science demande du temps, de l'intelligence, et dépend du hasard de certains choix qui s'avèrent heuristiques. Il est impossible de trouver un quota de résultats nouveaux et intéressants, de façon régulière.

Bibliographie
Ces détectives qui traquent les fraudes scientifiques : conversation avec Guillaume Cabanac. 2025. The Conversation. https://theconversation.com/ces-detectives-qui-traquent-les-fraudes-scientifiques-conversation-avec-guillaume-cabanac-258829